transfer

ENTRETIEN Monsieur Prof Dr Maurer, d’après vous, le changement climatique va modifier la gestion des eaux urbaines. Quelle en est la raison ? Nous devons modifier la façon de planifier et d’exploiter nos installations. Nous devons ajuster nos processus afin de les rendre plus dynamiques. Nous devons aussi mieux appréhender les risques, notamment ceux liés aux fortes pluies, et voir comment rendre nos constructions et le fonctionnement des infrastructures plus souples. Certes nos ouvrages s’étendent sur plusieurs générations, mais nous devons prendre conscience de la fin de la planification éternelle. À mes yeux, nous devons ici prévoir des réserves financières afin de garantir une flexibilité future, une chose que nous ne faisons que trop peu aujourd’hui. Concrètement, que suggérez-vous ? Le changement climatique est en cours : une chose indéniable. Nous ne connaissons cependant pas exactement ses répercussions sur l’assainissement des eaux urbaines. Il nous manque ici les outils et les informations quantitatives. Les modèles climatiques quotidiens couvrent des canevas très larges. L’assainissement des eaux urbaines demande de plus petites sections, soit des valeurs toutes les 10 ou 3 minutes. Cette disparité scientifique n’est pas encore compensée. Au bout du compte, nous ne sommes actuellement pas en mesure de calculer, et nous ne devons pas nous contenter de définir un « facteur changement climatique » pour dimensionner nos infrastructures. Il nous faut donc encore plus nous orienter sur les méthodes qui nous aident à prendre des décisions basées sur les risques. La question « Que faire quand » doit se poser. Comment faire ? D’après moi, nous devons ajuster notre façon de planifier et de dimensionner. Le premier point concerne les bases de nos planifications qui s’appuient selon moi, sur des données insuffisantes, voire erronées. Nous disposons certes de bons outils et modèles, mais personne ne les vérifie. Nous nous servons d’un modèle, simulons avec ce dernier, réalisons nos prévisions et prenons des mesures en fonction, construisons des bassins pour les eaux pluviales, mais personne ne contrôle si les prévisions se réalisent. À cela s’ajoute l’inexactitude et l’imprécision des quelques données disponibles. Malgré tout, nous prenons de cette manière en Suisse, des décisions portant sur plusieurs milliards d’euros. Une chose qu’il faut changer. En bref nous construisons beaucoup mais exploitons peu. En outre nos constructions ne sont pas adaptées à nos besoins, car nous ne les connaissons pas précisément. Nous construisons simplement grand. Tant que l’argent suffit, cela peut éventuellement fonctionner. Nous avons donc besoin de données plus fiables ? Cela est un premier point. Mais pour maîtriser le changement climatique, un autre aspect, et non le moindre, joue un rôle clé : l’urbanisme. En effet, la densification avancée entraîne l’augmentation des surfaces asphaltées dans les villes. Cela affecte nettement l’assainissement des eaux urbaines et l’évacuation des eaux de pluie. Bien sûr nous pouvons construire des bassins de retenue et les clôturer : une chose peu praticable. Ils ont besoin de place et restent « Nos constructions ne sont pas adaptées à nos besoins, car nous ne les connaissons pas précisément. Nous construisons simplement grand. » Prof Dr Max Maurer, Directeur responsable du service de gestion des eaux urbaines à l’Eawag, l’Institut fédéral des sciences et technologies de l’eau 01 | 2019 21 20 |

RkJQdWJsaXNoZXIy NTkxNzY=