transfer édition 01 | 2020

Une fusion tournée vers l’avenir

L’approvisionnement électrique à long terme chez tb.glarus

Dans le cadre de la restructuration du canton de Glaris, près de 50 fournisseurs énergétiques ont été regroupés en seulement trois entreprises. Martin Zopfi nous donne un aperçu des défis techniques et organisationnels que la régie Technischen Betriebe Glarus (tb.glarus), l’un des trois fournisseurs, a rencontré au cours du processus.

En 2006, le canton Glaris décida de réduire ses 25 communes en seulement trois : Glaris Nord, Glaris Sud et Glaris. « Cette étape décisive posait la première pierre du regroupement de tous les fournisseurs énergétiques en seulement trois », explique Martin Zopfi, Directeur du regroupement tb.glarus (voir à ce sujet l’article « Le regroupement des communes : une vraie chance » contenant l’entretien avec le conseiller d’État Röbi Marti, paru dans le numéro 01|2017).

Le regroupement tb.glarus prit rapidement conscience des chances d’une telle fusion. Il investit dans un système de conduite commun dédié à l’approvisionnement en eau, électricité, gaz et en chaleur, ainsi qu’à l’hydroélectricité et aux lignes de communication.

« Cela se terminait finalement par une question financière : est-ce que je veux exploiter cinq systèmes autonomes ou bien un seul ? »

Martin Zopfi, Directeur de la régie tb.glarus

« Tous les fournisseurs possédaient jusqu’ici leur propre système de conduite avec des disparités immenses entre ces-derniers », raconte Zopfi. Le système le plus ancien que le regroupement tb.glarus intégra, était déjà centenaire. Il se composait d’une ligne bifilaire qui transmettait l’arrivée d’eau d’une source. Cependant, même le système le plus récent avait déjà 18 ans.

Un processus de longue haleine

La fusion s’avéra loin d’être évidente, souligne le directeur : « Tous n’étaient pas partants pour la fusion. Nous avons donc intégré des installations extrêmement mal documentées. » Parmi celles-ci, certaines avaient été systématiquement remises en état au lieu de les moderniser en vue de conserver leur valeur. Les infrastructures intégrées ne couvraient donc en partie par les dernières évolutions technologiques.

« Au début, nous avons d’abord mis en place une cellule de crise. »

Martin Zopfi lui aussi ne rejoignit tb.glarus que peu de temps après le regroupement : « Lorsque j’ai débuté, on prévoyait un remplacement partiel du secteur ‹ Eau ›, afin de conserver temporairement son fonctionnement. » Cela semblait plutôt contradictoire aux yeux de Zopfi. Selon lui, la seule vraie possibilité à long terme était de regrouper tous les secteurs sous un même système de conduite. La question centrale restait de savoir si les mesures immédiates ciblées assureraient l’approvisionnement deux à trois ans de plus. Ce laps de temps couvrait en effet la planification approfondie et l’appel d’offres pour le système : chose qui par chance fonctionna très bien, souligne le directeur : « Au final, nous avons formulé près de 700 exigences destinées à la soumission. »

« Nous avons investi beaucoup de temps lors de la préparation de l’appel d’offres, afin de décrire très précisément ce dont nous avions besoin. »

Parallèlement au système de conduite, la régie tb.glarus lança un appel d’offres pour le système intelligent de mesure. L’entreprise accordait déjà à l’époque une importance cruciale à la convergence future des réseaux d’approvisionnement énergétiques. Elle était pleinement consciente de devoir s’appuyer sur une gestion active des charges mais aussi sur une mesure intelligente compatible avec un réseau intelligent. « Nous ne profitons vraiment de ces deux systèmes que si leur interaction est parfaite. Nous avons donc imposé des protocoles standard pour l’échange de données et défini clairement les interfaces », raconte Zopfi. « Une telle base nous permettra à l’avenir de travailler avec des technologies ouvertes indépendantes du fabricant afin de continuer de développer nos réseaux et élargir nos offres. »

L’embarras du choix

L’intégration exigée d’une mesure intelligent limitait déjà les fournisseurs pour le système de conduite. Le regroupement chercha donc parmi ces derniers un partenaire prêt à suivre sa logique d’intégration. Au final, on opta pour Rittmeyer : « Leur disposition à investir dans le développement afin de trouver une solution sur mesure, fit pencher la balance en leur faveur », explique l’informaticien en gestion. Un système hautement disponible et qui maîtrisait des fonctions de base bien précises, se trouvait au cœur de toutes les préoccupations. « Les gadgets et les fonctions secondaires n’entrèrent quasiment pas dans notre décision », comme le souligne le directeur.

Étape par étape

Le regroupement tb.glarus construisit son propre réseau à fibres optiques (FO), afin de venir à bout du haut débit de communication généré par le système. Ce réseau relie les nombreux points de données au système de conduite. Il couvre ainsi les exigences liées à la mesure intelligente tout en garantissant la qualité de l’approvisionnement ainsi que la protection du réseau. Depuis, le regroupement agit comme fournisseur de réseau FO et offre à ses clients professionnels, des services Internet, de téléphonie et de TV distante au travers de ce même réseau. Le réseau de communication est complété par les connexions sans fil point-à-point.

Après la mise en service du système principal, le regroupement tb.glarus déploya le projet, service par service, en commençant par l’approvisionnement en eau, suivi du gaz, de la chaleur distante et enfin des centrales. Le sous-projet ‹ Électricité › avait été récemment achevé. L’installation de la mesure intelligente se déroula en parallèle : près de la moitié se trouve déjà en service, et d’ici deux ans, tous les appareils devraient être installés.

Et les employés ?

Malgré les avantages d’un système de conduite commun, le projet s’est heurté à quelques résistances au début, reconnaît Martin Zopfi : « La première année, nous avons eu besoin de beaucoup plus de ressources liées à la formation. Nous avons constaté que nous devions repenser les différents rôles pour un regroupement. Nous avons déterminé qui à quel poste était le responsable le plus efficace pour mettre à disposition les différentes parties de l’installation. » Cela fut en partie un apprentissage compliqué, mais qui, grâce à Rittmeyer, fonctionna finalement bien.

La numérisation et la mise en réseau grandissantes exigent d’autres qualifications. La régie tb.glarus a donc largement investi dans la formation de ses employés tout en intégrant de nouvelles disciplines pour les spécialistes. Notamment en vue d’exploiter le système de conduite et d’utiliser la mesure intelligente, ils ont dû acquérir un nouveau savoir-faire afin de communiquer d’égal à égal avec les experts externes. « Nous disposons aujourd’hui d’informaticiens, électrotechniciens, fontainiers, ingénieurs en systèmes ainsi que d’autres spécialistes. Nous les avons réunis afin que chacun mette ses compétences en commun en vue d’une meilleure compréhension des différentes tâches », explique Zopfi en soulignant les changements opérés au sein du personnel. Il est convaincu de limiter ainsi les risques liés à l’ingénierie sociale.

« Notre entreprise a connu une vraie mutation culturelle. »

Le projet cachait aussi un autre défi : convaincre et accompagner les employés vers la fusion. En repensant aux évènements, le directeurs aurait encore mieux intégré et accompagné son équipe pendant le processus : « Guider pas à pas les gens vers de nouvelles tâches et technologies est vecteur d’une meilleure acceptance. On doit aussi s’assurer que les souhaits particuliers ne prennent pas une trop grande proportion », résume Martin Zopfi. Le désir de s’épanouir reste très important dans un tel projet, et il a parfois fallu s’en tenir aux restrictions budgétaires. Mais au bout du compte, réduire la complexité signifie aussi gagner en sécurité dans l’exploitation.

Résumé et tâches futures

Pendant deux ans, les installations des anciennes régies d’approvisionnement de la commune principale du canton ainsi que des communes Netstal, Riederen et Ennenda ont été regroupées en un seul système de conduite.

« Grâce au nouveau système, nous sommes en mesure de répondre aux attentes de nos clients en matière de transparence et d’efficacité : chose essentielle. »

La planification soignée et la mise en œuvre étape par étape, ont été, selon Zopfi, décisives à la réussite. Le raccordement de l’approvisionnement en électricité dans le nouveau système en décembre 2019, achève temporairement ce grand projet. Le prochain défi attend déjà : le projet suivant lié à la chaleur distante sera intégré dans les prochains mois.

Les technologies de conduite centrales ouvrent de tous nouveaux champs d’application : la commande de l’éclairage public devrait aussi rejoindre ce système commun et faire partie de la gestion active des charges. De nouvelles idées se profilent aussi d’ors et déjà : au printemps 2020, la régie tb.glarus lancera une communauté solaire. Les clients peuvent louer pendant deux décennies des parts d’installations photovoltaïques construites par le regroupement, puis recevoir un avoir sur leur facture d’électricité : une avance qui se rentabilise pour tous – fournisseur énergétique, consommateur et environnement.

Crédit photo: Martin Steiner 77/Shutterstock.com (photo de couverture)