Le regroupement des communes : une vraie chance
Derrière l’approvisionnement et l’assainissement communaux : expériences du regroupement des communes dans le canton de Glaris
Sous le titre « GL 2011 – 3 communes fortes – 1 canton compétitif », le canton de Glaris a regroupé ses 25 communes en trois communes fusionnées au 1er janvier 2011. Nous avons rencontré le Conseiller d’État Röbi Marti, qui dirigeait en 2006, une des communes qui avait pris cette décision historique. Nous avons discuté avec lui des effets sur l’élimination et l’approvisionnement communaux.
Monsieur Marti, la fusion des communes était à l’époque une décision très avant-gardiste et jusqu’ici en Suisse, une décision unique. Comment la décision a-t-elle été prise ?
Jusqu’au début du siècle, le canton de Glaris était un canton avec une économie florissante. Lors de la crise économique de plusieurs grands groupes industriels, les finances du canton et des différentes communes ont été nettement affectées. En même temps, il devenait de plus en plus difficile de trouver des citoyens prêts à s’engager dans les communes dirigées par un « système de milice ». Certaines communes très petites n’étaient plus capables de se charger seules de leurs activités ni de les financer. La réforme des structures communales s’est alors imposée.
Partant de là, les communes glaronaises ont décidé démocratiquement le 7 mai 2006, de fusionner les 25 communes du canton en seulement trois communes. La demande venait ici du peuple. Le gouvernement et le conseil cantonal avaient auparavant favorisé une fusion en 10 communes.
Quels effets a eu la réforme des structures communales sur les fournisseurs communaux ?
Avant la réforme, nous avions 31 fournisseurs en eau, soit plus que le nombre de communes. Chacun possédait sa propre source, ses propres pompes dans la nappe phréatique ainsi que ses propres réservoirs. Il fallait que cela change. Pour cela, il fallut opérer un important travail afin de convaincre les communes, notamment les plus riches d’entre-elles qui selon elles étaient à même de financer leur autonomie. Avec pour objectif d’améliorer ensemble la qualité de l’eau et la fiabilité de l’approvisionnement, les portes se sont vite ouvertes. Nous avons ainsi pu éliminer les mauvaises sources et mieux profiter de celles qui étaient meilleures. Cela a eu des effets clairement positifs.
La situation avec les fournisseurs en électricité était encore plus grave. Le canton comptait 18 fournisseurs où le plus petit générait un chiffre d’affaires annuel n’atteignant même pas les 1,6 GWh. Les fournisseurs n’auraient jamais pu relever seuls les défis liés à l’exploitation et l’élargissement du réseau, et ce ni aujourd’hui et encore moins demain. Je pense notamment à la construction des structures redondantes afin de garantir la sécurité de l’approvisionnement. Ou encore les technologies de conduite requises pour faire face au nombre croissant de générateurs photovoltaïques décentralisés qui servent à maintenir un approvisionnement stable. Il en va de même avec l’intégration des compteurs intelligents (Smart Metering). Aujourd’hui nous avons trois zones d’approvisionnement, respectivement avec un chiffre d’affaires compris entre 100 et 140 GWh. Même ces valeurs posent de vrais défis et les fournisseurs d’électricité doivent continuer à optimiser leur processus afin d’être des mieux armés face à l’ouverture du marché.
Enfin, l’approvisionnement en gaz était quant à lui déjà dans les mains d’un seul fournisseur, donc nous n’avions rien à changer.
Et les sociétés d'élimination ?

Pour les eaux usées et les déchets, il existait déjà des regroupements. Donc ici rien n’a bougé. Il fut donc assez simple de regrouper ces entreprises. Personne ne se dispute les déchets (souriant). Le cadre pour avancer ensemble à l’avenir était ici déjà présent.
Avant leur décision, les citoyens avaient-ils déjà conscience des défis que les fournisseurs aller devoir relever ?
Définitivement pas. La plupart n’en savait certainement rien. Lors du vote ce sont d’autres raisons qui ont prôné bien que le regroupement ait ouvert d’importantes possibilités pour les fournisseurs. De telles décisions n’ont pas non plus la même portée pour tous. Les communes plus riches qui disposent d’une plus grande marge de manœuvre, ressentirons le regroupement complètement différemment que les communes plus modestes. Après la fusion, certaines choses sont devenues moins chères alors que le coût d’autres a augmenté. Par exemple pour les communes qui ont cédé leurs droits cantonaux à un exploitant de centrale en contrepartie d’un courant meilleur marché. Cela n’est désormais plus possible.
« Lors du vote, la majorité des citoyens et citoyennes n’avait pas conscience des défis que les fournisseurs communaux devraient relever à l’avenir ni des conséquences de ces derniers. »
Et aujourd’hui ?
Je dirais que la fusion a été acceptée et a aboutie ainsi que ses effets sont clairement positifs. Bien sûr il y a toujours des réactionnaires qui s’accrochent au passé. Mais les jeunes glaronais ont vu et voient encore aujourd’hui les chances qu’apportent la réforme structurelle des communes. C’est peut-être une question de génération qui ne se résout qu’avec le temps.
La valeur ajoutée issue de la fusion des fournisseurs d’eau et d’électricité, pour revenir à notre sujet, a bien été identifiée et reste très appréciée.
Dix ans après ces « états généraux », que pensez-vous de la décision sur la réforme structurelles des communes et qu'auriez-vous fait autrement ?
La réforme structurelle était à l’époque indispensable. Cependant, je pense que cette décision sans les « états généraux » (Landsgemeinde), pratique que nous soignons dans le canton de Glaris, n’aurait pas été possible. De même, sans fusion, il n’y aurait plus « d’états généraux ». L’importance de cette institution démographique a été prouvé lors des « états généraux » exceptionnels de 2007 au cours desquels la décision de fusion prise en 2006 a été de nouveau approuvée.

Si on prolongeait le raisonnement aujourd’hui, l’étape ultime aurait été de regrouper Glaris en une seule commune. La ville de Bâle l'a bien fait. Mais je ne crois pas qu’en 2006, cela aurait été possible.
Puis l’idée elle-même était complètement nouvelle. Quelque chose de semblable sur lequel nous aurions pu nous baser, n’existait pas en Suisse. Sans doute, qu’aujourd’hui nous réfléchirions comment mieux gérer la période entre la décision et la formation d’une commune unique. Je pense que les communes les plus riches qui étaient encore autonomes, ont forcé certaines décisions d’investissement qui n’étaient pas placées dans une vue d’ensemble, Mais il faut ici admettre : un gouvernement ne peut rien faire dans ce cas.
Peut-être qu’on réfléchirait comment systématiquement regrouper les services administratifs et les régies communales. Avec le recul, nous constatons aujourd’hui que nous n’avons pas pleinement profité de toutes les possibilités. Mais cela est aussi difficile à faire. Même dans des cantons aussi petits que le nôtre, il existe des convoitises historiques qui n’ont cessé de grandir au fil des années. Et là on ne peut rien y changer.
Merci beaucoup pour cet entretien.
Catégories
Interviews d’expert
Zones
Approvisionnement en eau
Alimentation en électricité